Illustration et quatrième de couverture
L'Homme illustré, réédition @ 2023 Folio SF | L'affiche du film Rocketman (2019) avec Taron Eggerton | Photo @ Koyolite Tseila
« II retira sa chemise et la roula en boule. De l'anneau bleu tatoué autour de son cou jusqu'à la taille, il était couvert d'Illustrations.
« Et c'est comme ça jusqu'en bas », précisa-t-il, devinant ma pensée. « Je suis entièrement illustré. Regardez ! »
Il ouvrit la main. Sur sa paume, une rose. Elle venait d'être coupée ; des gouttelettes cristallines émaillaient ses pétales délicats. J'étendis ma main pour la toucher, mais ce n'était qu'une image.
« Mais elles sont magnifiques ! m'écriai-je.
- Oh oui, dit l'Homme Illustré. Je suis si fier de mes Illustrations que j'aimerais les effacer en les brûlant. J'ai essayé le papier de verre, l'acide, le couteau... Car, voyez-vous, ces Illustrations prédisent l'avenir. »
« Et c'est comme ça jusqu'en bas », précisa-t-il, devinant ma pensée. « Je suis entièrement illustré. Regardez ! »
Il ouvrit la main. Sur sa paume, une rose. Elle venait d'être coupée ; des gouttelettes cristallines émaillaient ses pétales délicats. J'étendis ma main pour la toucher, mais ce n'était qu'une image.
« Mais elles sont magnifiques ! m'écriai-je.
- Oh oui, dit l'Homme Illustré. Je suis si fier de mes Illustrations que j'aimerais les effacer en les brûlant. J'ai essayé le papier de verre, l'acide, le couteau... Car, voyez-vous, ces Illustrations prédisent l'avenir. »
Dix-huit Illustrations, dix-huit histoires à fleur de peau par l'un des plus grands poètes du fantastique et de la science-fiction.
Sommaire
- La Brousse (The Veldt, 1950)
- Kaléidoscope (Kaleidoscope, 1949)
- Comme on se retrouve (The Other Foot, 1951)
- La Grand-route (The Highway, 1950)
- L'Homme (The Man, 1949)
- La Pluie (The Long Rain / Death-by-Rain, 1950)
- L'Homme de l'espace (The Rocket Man, 1951) ✔
- La Dernière nuit du monde (The Last Night of the World, 1951)
- Les Bannis (The Exiles / The Mad Wizards of Mars, 1949)
- Ni un soir ni un matin (No Particular Night or Morning, 1951)
- Le Renard et la forêt (The Fox and the Forest / The Fox in the Forest / To the Future, 1950)
- Le Visiteur (The Visitor, 1948)
- La Bétonneuse (The Concrete Mixer, 1949)
- Automates, société anonyme (Marionettes, Inc., 1949)
- La Ville (The City / Purpose, 1950)
- L'Heure H (Zero Hour, 1947)
- La Fusée (The Rocket / Outcast of the Stars, 1950)
- L'Homme illustré (The Illustrated Man, 1950)
Sommaire
- La Brousse (The Veldt, 1950)
- Kaléidoscope (Kaleidoscope, 1949)
- Comme on se retrouve (The Other Foot, 1951)
- La Grand-route (The Highway, 1950)
- L'Homme (The Man, 1949)
- La Pluie (The Long Rain / Death-by-Rain, 1950)
- L'Homme de l'espace (The Rocket Man, 1951) ✔
- La Dernière nuit du monde (The Last Night of the World, 1951)
- Les Bannis (The Exiles / The Mad Wizards of Mars, 1949)
- Ni un soir ni un matin (No Particular Night or Morning, 1951)
- Le Renard et la forêt (The Fox and the Forest / The Fox in the Forest / To the Future, 1950)
- Le Visiteur (The Visitor, 1948)
- La Bétonneuse (The Concrete Mixer, 1949)
- Automates, société anonyme (Marionettes, Inc., 1949)
- La Ville (The City / Purpose, 1950)
- L'Heure H (Zero Hour, 1947)
- La Fusée (The Rocket / Outcast of the Stars, 1950)
- L'Homme illustré (The Illustrated Man, 1950)
Mes impressions sur les nouvelles de ce recueil au gré de mes lectures...
L'Homme de l'espace (The Rocket Man, 1951) 💜💜💜💜💜
Ray Bradbury nous plonge dans un futur où les vols spatiaux sont devenus monnaie courante. Le protagoniste, un astronaute, est constamment en déplacement entre la Terre et d’autres planètes. Cependant, son métier a un prix élevé : il est séparé de sa famille pendant de longues périodes. Sa femme et son fils attendent patiemment son retour, mais ils ne peuvent pas vraiment comprendre sa passion pour l’espace...
A la fois magnifique et mélancolique, L'Homme de l'espace est une nouvelle dans laquelle chaque mot est choisi avec soin pour raconter l'histoire de cet astronaute. Le récit explore les thèmes de la solitude, du sacrifice et de la distance émotionnelle entre les êtres humains. Le personnage principal est tiraillé entre son amour pour l’espace et son désir de rester près de sa famille. Il est un homme déchiré entre deux mondes, et sa vie est un équilibre fragile entre ces deux réalités.
Ce passage au cours duquel il s’adresse à Doug, son fils, est révélateur du conflit intérieur qui l’anime :
L’auteur nous invite à réfléchir sur les choix que nous faisons et les conséquences qu’ils ont sur nos relations et notre bien-être… mais aussi sur celui de nos proches.
[Attention spoilers]
En effet, Doug est triste. Lors des rares occasions où son père rentre à la maison, il désire ardemment qu'il lui parle de son travail, qu'il partage les détails de ce qui se passe là-haut, les types de missions ou les découvertes réalisées. Cependant, son père évite ces sujets, ce qui attriste profondément le garçon. Doug remarque aussi que les pères de ses amis leur rapportent toujours un petit cadeau de leurs voyages. Lui, par contre, ne reçoit jamais de présents. Ainsi, lorsque son père arrive au bercail et va se reposer, Doug en profite pour fouiller dans sa mallette et, guidé par les odeurs émanant de son uniforme, il imagine les aventures que son père a vécues :
Il place ensuite ledit uniforme dans une sorte de centrifugeuse afin d’en extraire les sables et les poussières, qu’il conserve précieusement dans un bocal en verre, comme un cadeau que son père lui aurait ramener de l’espace.
Quant à son épouse, Lilly, l’astronaute a souvent l’impression qu’elle n’a pas l’air de l’entendre ni de le voir. Quand Doug la questionne à ce propos, sa maman lui explique que lorsqu’il est parti pour son premier voyage, il y a dix ans, elle s’est dit qu’il est mort. Ou tout comme. Et quand il revient, quelques fois par an, ce n’est pas lui du tout, ce n’est qu’un souvenir agréable, un rêve. Quand un souvenir, quand un rêve s’interrompt, cela ne fait pas aussi mal, que si c’était vraiment son mari. C’est pourquoi, presque tout le temps, elle pense à lui comme s’il était mort… Imaginer qu’il pourrait périr et qu’elle ne le reverrait jamais, lui est beaucoup trop pénible, au point que la nuit venue, elle ne peut pas contempler les étoiles.
Dans le dernier paragraphe, le texte est poignant. On découvre que ce ne seront ni Mars, ni Vénus, ni Saturne, ni Jupiter qui causeront la perte du protagoniste. Doug et Lilly n'auront plus à se souvenir de lui à chaque lever de ces planètes. Ce sera quelque chose de bien plus terrible…
[Fin des spoilers]
Vous l'aurez compris : j'ai eu un énorme coup de cœur pour cette nouvelle, remarquablement bien écrite, qui m'a émue et touchée au plus profond de mon être. 💜
En 1972, Bernie Taupin s’est inspiré de cette nouvelle pour écrire les paroles de Rocket Man (I think it’s gonna be a long, long time), single – que j’adore ! - de Sir Elton John. La chanson décrit les sentiments d’un astronaute qui part en mission dans l’espace, loin de sa famille.
« Je suis un homme-fusée qui pète un plomb tout seul là-haut… »
Les paroles ont un double sens, car elles racontent également l’histoire d’un homme sous l’emprise de substances hallucinogènes...
A la fois magnifique et mélancolique, L'Homme de l'espace est une nouvelle dans laquelle chaque mot est choisi avec soin pour raconter l'histoire de cet astronaute. Le récit explore les thèmes de la solitude, du sacrifice et de la distance émotionnelle entre les êtres humains. Le personnage principal est tiraillé entre son amour pour l’espace et son désir de rester près de sa famille. Il est un homme déchiré entre deux mondes, et sa vie est un équilibre fragile entre ces deux réalités.
Ce passage au cours duquel il s’adresse à Doug, son fils, est révélateur du conflit intérieur qui l’anime :
« Je veux que tu me promettes quelque chose.
- Quoi donc, papa ?
- Ne deviens jamais un homme de l’espace.
Je m’arrêtai.
- Je suis sérieux, reprit-il. Parce que, quand on est là-bas, on a envie d’être ici ; et quand on est ici, on a envie d’être là-bas. Ne te mets pas là-dedans. Ne te laisse pas avoir par ce truc.
- Mais…
- Tu ne sais pas ce que c’est. Chaque fois que je me trouve là-bas, je me dis : si jamais je reviens sur Terre, j’y resterai ; je ne repartirai plus jamais. Mais je repars et je crois bien que je continuerai à le faire toute ma vie. » (Ray Bradbury, L’Homme de l’espace, 1951)
L’auteur nous invite à réfléchir sur les choix que nous faisons et les conséquences qu’ils ont sur nos relations et notre bien-être… mais aussi sur celui de nos proches.
[Attention spoilers]
En effet, Doug est triste. Lors des rares occasions où son père rentre à la maison, il désire ardemment qu'il lui parle de son travail, qu'il partage les détails de ce qui se passe là-haut, les types de missions ou les découvertes réalisées. Cependant, son père évite ces sujets, ce qui attriste profondément le garçon. Doug remarque aussi que les pères de ses amis leur rapportent toujours un petit cadeau de leurs voyages. Lui, par contre, ne reçoit jamais de présents. Ainsi, lorsque son père arrive au bercail et va se reposer, Doug en profite pour fouiller dans sa mallette et, guidé par les odeurs émanant de son uniforme, il imagine les aventures que son père a vécues :
« Telle une nébuleuse sombre parsemée d’étoiles scintillant çà et là, au loin, dans l’étoffe, son uniforme noir glissa de la mallette ouverte. Je pétris dans mes mains chaudes ma trouvaille. Je humai l’odeur de fer de Mars, l’odeur de lierre vert de Vénus, le parfum de soufre et de feu de Mercure. Je sentis l’humeur laiteuse et la dureté des étoiles ». (Ray Bradbury, L’Homme de l’espace, 1951)
Il place ensuite ledit uniforme dans une sorte de centrifugeuse afin d’en extraire les sables et les poussières, qu’il conserve précieusement dans un bocal en verre, comme un cadeau que son père lui aurait ramener de l’espace.
Quant à son épouse, Lilly, l’astronaute a souvent l’impression qu’elle n’a pas l’air de l’entendre ni de le voir. Quand Doug la questionne à ce propos, sa maman lui explique que lorsqu’il est parti pour son premier voyage, il y a dix ans, elle s’est dit qu’il est mort. Ou tout comme. Et quand il revient, quelques fois par an, ce n’est pas lui du tout, ce n’est qu’un souvenir agréable, un rêve. Quand un souvenir, quand un rêve s’interrompt, cela ne fait pas aussi mal, que si c’était vraiment son mari. C’est pourquoi, presque tout le temps, elle pense à lui comme s’il était mort… Imaginer qu’il pourrait périr et qu’elle ne le reverrait jamais, lui est beaucoup trop pénible, au point que la nuit venue, elle ne peut pas contempler les étoiles.
« Et s’il périt sur Vénus ? Nous ne pourrons plus jamais regarder Vénus. Et si c’est sur Mars ? Nous ne pourrons plus jamais regarder Mars, toute rouge dans le ciel, sans avoir envie de rentrer et de fermer la porte à clef. Et s’il mourrait sur Jupiter, sur Saturne ou sur Neptune ? Les nuits où ces planètes seraient bien visibles, nous n’aurions nulle envie de les regarder. » (Ray Bradbury, L’Homme de l’espace, 1951)
Dans le dernier paragraphe, le texte est poignant. On découvre que ce ne seront ni Mars, ni Vénus, ni Saturne, ni Jupiter qui causeront la perte du protagoniste. Doug et Lilly n'auront plus à se souvenir de lui à chaque lever de ces planètes. Ce sera quelque chose de bien plus terrible…
[Fin des spoilers]
Vous l'aurez compris : j'ai eu un énorme coup de cœur pour cette nouvelle, remarquablement bien écrite, qui m'a émue et touchée au plus profond de mon être. 💜
En 1972, Bernie Taupin s’est inspiré de cette nouvelle pour écrire les paroles de Rocket Man (I think it’s gonna be a long, long time), single – que j’adore ! - de Sir Elton John. La chanson décrit les sentiments d’un astronaute qui part en mission dans l’espace, loin de sa famille.
« Je suis un homme-fusée qui pète un plomb tout seul là-haut… »
Les paroles ont un double sens, car elles racontent également l’histoire d’un homme sous l’emprise de substances hallucinogènes...
D'autres retours de lectures suivent...
... et si toutes les nouvelles de ce recueil sont de cette qualité, cela promet une apothéose !