Le Cycle du A | The World of Null-A | A.E. Van Vogt | 1945-1984

Par | 06/11/2011 | Lu 803 fois




XXVI siècle. En prenant part aux jeux de la machine dans l'espoir de décrocher une place sous le soleil de Vénus, Gilbert Gosseyn découvre qu'il n'est pas l'homme qu'il a toujours cru être. Ses souvenirs ne lui appartiennent pas, son épouse, qu'il croyait décédée, ne l'est pas, et d'ailleurs, ce n'est même pas sa femme ! Pourtant, il comprend vite qu'il n'est qu'un pion au sein d'un vaste complot, dont la finalité lui échappe. Un pion ou la pièce maîtresse ?

Introduction

Le philosophe grec Aristote a établi un système du monde dualiste. Par exemple, une personne est bonne ou mauvaise, le ciel est bleu ou non, la température est chaude ou froide, etc. Ce système est dit "aristotélicien". Alfred Korzybski s'est attaqué de façon systématique à cette représentation par le biais de la "sémantique générale", qui est parfois qualifié de Ā (se prononce "non-A"). L'auteur A.E. van Vogt propose une version romancée de ce que pourrait être une civilisation Ā, ainsi que de ses plus brillants représentants. (Source : Wikipédia)

Tome 1 - Le Monde des A (The World of Null-A, 1945)

XXVIe siècle. Difficile de se faire une identité dans l'immensité anonyme de l'empire galactique... surtout quand on est amnésique. Car en prenant part aux jeux de la machine - qui permettent aux gagnants de rejoindre la caste des nantis sur Venus -, Gilbert Gosseyn découvre qu'il n'est pas l'homme qu'il a toujours cru être. Ses souvenirs ne sont pas les siens, sa femme qu'il croyait décédée n'est pas morte, d'autant qu'il n'a jamais été marié ! Il peut même ressusciter lorsqu'on attente à sa vie... Mais malgré cette aptitude : à se réincarner, il comprend vite qu'il n'est qu'un pion au sein d'un vaste complot dont la finalité lui échappe. Un pion ou... la pièce maîtresse ?

Tome 2 - Les Joueurs du A (The Players of Ā, 1956)

La fin du Monde des À semblait avoir laissé Gilbert Gosseyn maître de la situation. C'est alors que vont se révéler les participants du jeu d'échecs cosmique dont il n'était qu'un pion inconscient. D'abord le Disciple, personnage impitoyable dont la substance est faite d'ombre - ensuite Enro le Rouge, dictateur du "Plus grand empire", qui s'apprête à asservir l'univers entier. Enfin le joueur inconnu qui a manipulé Gosseyn et l'a forcé à assumer un destin qui n'était pas le sien. Mais Gilbert Gosseyn existe-t-il encore ? N'occupe-t-il pas désormais le corps du faible et pusillanime prince Ashargin ?

Tome 3 - La Fin du A (Ā Three, 1984)

A l'autre extrémité de la galaxie, Gilbert Gosseyn se réveille à bord d'un astronef inconnu... et dans un nouveau corps, Gosseyn trois. Pourtant, il conserve les souvenirs de ses deux précédentes incarnations, et peut même communiquer par télépathie avec Gosseyn deux, qui vit toujours, quelque part. Peu à peu, Gosseyn retrouve la maîtrise de ses extraordinaires pouvoirs mentaux. Il parvient à regagner la terre et retrouve ses compagnons qui l'ont aidé à combattre Enro le rouge. Mais n'est-ce pas plutôt son alter ego Gosseyn deux que ceux-ci ont aidé ? La machine des jeux, même démantelée, pourra-t-elle l'aider à trouver la raison de ce dédoublement, de cette "similarisation" ?

Fiche de lecture

Si l’on considère que Van Vogt a écrit le premier tome du « Cycle du Ā » en 1945, on peut dire de lui qu’il était visionnaire, tout comme l’était Jules Verne en son temps, car il a envisagé un futur absolument extraordinaire. A l’instar du « Meilleur des Mondes » d’Aldous Huxley, bien que la modernité technologique soit très présente, il n’y a pas d’ordinateurs, pas de téléphones mobiles, etc., ce qui, à l’heure actuelle, peut donner l’impression que le présent cycle a vieilli ou qu’il n’est plus au goût du jour. Pour ma part, cela ne me dérange pas, au contraire, cela confère au livre un charme particulier. Il faut donc le lire avec du recul et en tenant compte du contexte de l’époque à laquelle il a été écrit.

Dès les premières pages, mon intérêt est éveillé. L’intrigue est accrocheuse, et le concept, intéressant. Un homme nommé Gosseyn est l’un des nombreux participants à un jeu géré par la Machine, une intelligence artificielle. Au début de la partie, après avoir passé par une sorte de détecteur de mensonges, il s’avère que Gosseyn n’est pas celui qu’il croyait être. Sa mémoire et ses souvenirs ont été modifiés. Par qui, par quoi, et dans quel but ? C’est ce qu’il va essayer de découvrir. En quête d’identité, Gosseyn va se rendre compte qu’il est un pion majeur au sein d’événements galactiques. Il sera traqué, puis tué. Mais il s’apercevra bien vite qu’il possède – pour une raison qu’il ignore – l’incroyable faculté de se réincarner, et que son cerveau est doté de matière cérébrale additionnelle. Avec le temps, il apprendra à l’utiliser pour mettre en échec certains projets.

L’auteur mélange des styles différents, allant du roman policier à celui de SF, en passant par l’essai philosophique. Il y a des passages où la lecture s’avère difficile et j’avoue avoir eu recours à un dictionnaire pour comprendre le principe sur lequel repose l’histoire : le non-A (lettre A surmontée d’une barre oblique), c'est-à-dire la sémantique générale ou système de pensée « non-aristotélicien ». Après avoir assimilé le fait qu’il est question d’un monde dans lequel la logique formelle ne s’applique pas, ma compréhension générale du livre s’est améliorée.

Néanmoins, au fur et à mesure du roman, les rapports entre les divers protagonistes deviennent de plus en plus compliqués. On a l’impression que les événements sont presque des non-événements. Et le concept de la Machine, qu’on croyait être le fondement de l’histoire, tend à devenir un à-côté. Plus rien n’est normal. A ce stade, on pourrait dire de l’histoire qu’elle est incompréhensible (et c’est vrai par moments). Personnellement, je trouve cela plutôt fort : en fait, c’est un peu comme si l’auteur avait écrit un cycle non-aristotélicien, à l’image de cette philosophie.

En conclusion, voici un ouvrage qui requiert de la concentration et qui débouche sur des réflexions. Je pense en effet que le Cycle du Ā fait partie de ces grands classiques incontournables pour tous les assidus de science-fiction. Mais du fait de son aspect peu trivial et de son style – parfois - lourd, je l’estime peu approprié pour les personnes qui voudraient découvrir la SF. A noter encore que si les deux premiers tomes sont biens, le troisième, lui, présente un peu moins d’intérêt.

Une toute dernière chose, et non des moindres : il est a noter que la traduction française de cet ouvrage a été faite par Boris Vian.

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