Le dieu sans nom @ 2015 éditions Rivière Blanche | Illustration de couverture @ Daniele Serra
Illustration et quatrième de couverture
Tout à coup, la scène fut illuminée comme en plein jour, et un nouvel enfer se déchaîna. Quatre hélicoptères de combat, des Black Hawk, se tenaient face au dieu hurlant, surgis de derrière le rideau des arbres, dans le dos de Yann. Les engins avaient allumé de puissants projecteurs, braqués comme des lances de feu blanc sur le cuir scrofuleux de Xub-Niggurash. Yann perçut qu’une partie de l’attention maligne du Dieu Ancien se tournait vers les appareils. Les pilotes aussi, sans doute, car ils ouvrirent le feu simultanément.
Imaginez un Lovecraftien qui montrerait les monstres et ne se contenterait pas d’en suggérer l’existence. Qui sans abandonner l’usage du hors-champ n’hésiterait pas à se servir du zoom si nécessaire. Imaginez un Lovecraftien qui aurait le sens du rythme et n’aurait pas peur d’écrire des scènes d’action. Le roman qui donne son titre à ce recueil, ainsi que les deux longues nouvelles suivantes, L’ennemi ancien et L’ombre des docks, doivent sans doute beaucoup au reclus de Providence. Mais ils prouvent aussi de façon éclatante que Serge Rollet dispose du brio nécessaire pour jouer avec un feu qui a déjà brûlé nombre de suiveurs sans personnalité.
Serge Rollet, alias Lester L. Gore, qualifie son parcours de "chaotique" et "accidenté". Soit. La route vers ce recueil fut certes longue et semée d’embûches, mais les chemins de traverse sont parfois pavés de bonnes intentions. Surtout ceux qui mènent de L’œil du Sphinx à la Rivière Blanche. Quant à savoir ce qui gît au loin dans le noir, là c’est une autre histoire
Imaginez un Lovecraftien qui montrerait les monstres et ne se contenterait pas d’en suggérer l’existence. Qui sans abandonner l’usage du hors-champ n’hésiterait pas à se servir du zoom si nécessaire. Imaginez un Lovecraftien qui aurait le sens du rythme et n’aurait pas peur d’écrire des scènes d’action. Le roman qui donne son titre à ce recueil, ainsi que les deux longues nouvelles suivantes, L’ennemi ancien et L’ombre des docks, doivent sans doute beaucoup au reclus de Providence. Mais ils prouvent aussi de façon éclatante que Serge Rollet dispose du brio nécessaire pour jouer avec un feu qui a déjà brûlé nombre de suiveurs sans personnalité.
Serge Rollet, alias Lester L. Gore, qualifie son parcours de "chaotique" et "accidenté". Soit. La route vers ce recueil fut certes longue et semée d’embûches, mais les chemins de traverse sont parfois pavés de bonnes intentions. Surtout ceux qui mènent de L’œil du Sphinx à la Rivière Blanche. Quant à savoir ce qui gît au loin dans le noir, là c’est une autre histoire
Les nouvelles
Préface de Artikel Unbekannt
1 - Le Dieu sans nom
2 - L’ennemi ancien
3 - L’ombre des docks
4 - Baphomet
5 - Le portrait
6 - L’étranger
7 - Conte de poivrot
8 - Le grand tirage
9 - Les successeurs
10 - Les quatre saisons de l’apocalypse
11 - Entretien avec l’auteur
1 - Le Dieu sans nom
2 - L’ennemi ancien
3 - L’ombre des docks
4 - Baphomet
5 - Le portrait
6 - L’étranger
7 - Conte de poivrot
8 - Le grand tirage
9 - Les successeurs
10 - Les quatre saisons de l’apocalypse
11 - Entretien avec l’auteur
Fiche de lecture
J’ai eu l’occasion de rencontrer Serge Rollet au salon Finistellaire#2 de novembre 2022 à Quimper, avec une heureuse surprise : il est moins inquiétant que sa caricature. Du coup, j’ai osé prendre son premier recueil et discuter avec lui pour m’apercevoir que, non seulement il souriait, mais qu’il était aussi moins dangereux que ses histoires ou que son précédent nom d’auteur ne le laissait craindre. Ouf ! Sauvé !
À partir de là, il me restait à lire ledit fix-up et à tenter de survivre au « Dieu sans nom ».
Grâce à la petite invocation qu’il m’a « grabouillée » avec la dédicace, ça a marché : je suis toujours de ce monde – je sais, dommage pour vous, mais bon, c’est ainsi.
Et à cet instant, vous devriez vous apercevoir que j’ai écrit plusieurs phrases sans même parler du contenu du livre – exactement comme les hommes politiques pour faire patienter et trouver comment répondre à la question tordue qu’on vient de leur poser.
Quel rapport ? Eh bien, essayer d’évoquer ce recueil est chose ardue, tout simplement parce qu’Artikel Unbekannt [les germanophones s’y retrouveront] le fait parfaitement bien dans sa préface en balayant chaque histoire et en comparant l’auteur aux grandes plumes du fantastique. Ce qui signifie que vous n’avez pas le choix : vous devrez acquérir ledit ouvrage pour y découvrir la meilleure et la plus juste des « chroniques ».
Bon, d’accord, je vais faire un effort et m’y mettre moi aussi. Ce qui est quand même sacrément compliqué après cette préface, l’air de rien.
Commençons donc par le début avec le roman court qui a prêté son nom au recueil [à moins que ce ne soit le recueil qui ait piqué son titre à l’histoire sans lui demander l’autorisation] : celle du Dieu sans nom. Le point de départ ? Un dieu-démon est emprisonné dans une pyramide-cocon qui l’empêche de s’échapper pour asservir le monde. Mais boum badaboum, des anthropologues et archéologues viennent tout casser et libèrent l’être démoniaque qui n’a qu’une idée en tête : reconquérir la Terre et s’y installer après avoir éliminé les humains occupant indûment la place qu’il considère comme sienne. Heureusement, la société secrète des Medjaÿ va tout faire pour bloquer le retour de… Oups ! Non ! Erreur ! Ça, c’est « La Momie » avec Rick O’Connell et Evelyn Carnahan.
Bref, comme plusieurs autres textes dudit recueil, l’histoire est usée jusqu’à la corde, c’est du lu ou vu, relu ou revu… si ce n’est qu’un petit détail transforme tout. Un détail énorme même : l’auteur a rebattu les cartes et appose des dièses et des bémols exactement où il faut pour changer agréablement la musique. Et c’est là tout le plaisir de ces histoires : Serge Rollet nous les sert à sa sauce, mêlant fantastique – il ose nous décrire les monstres –, horreur – il n’hésite pas à faire jaillir tripes et hémoglobine où et quand il en faut –, action – Indy et « Dutch » Schaefer ne sont pas loin –, cynisme, humour, dérision, etc. jusqu’à nous bousculer à chaque fois par une fin abrupte, comme s’il nous poussait bien gentiment, mais fermement par-dessus le rebord de la falaise afin de mieux nous amener à apprécier le dessert.
Moi qui ai commencé ce livre en soupirant après quelques pages jusqu’à le reposer, je me suis retrouvé happé lorsque deux soirs plus tard, je l’ai de nouveau saisi. Revoir la Momie, version Grand Ancien à la place d’Imhotep avec une référence aux 7 plaies d’Égypte, m’a emballé au fur et à mesure que je dévorai les courts et incisifs chapitres.
Et la suite n’a en rien dépareillé, se révélant tout aussi excellente. D’abord parce que j’ai découvert dans « L’ennemi ancien » une reprise de Predator, version Grand Ancien là encore, qui m’a beaucoup plu et amusé avec une conclusion bien secouée comme le film. Ensuite parce que chaque histoire amène son lot de surprises.
Il m’est apparu que l’auteur savait faire flèches de plusieurs arcs – mon oreillette me susurre qu’il faut dire avoir plusieurs cordes à son arc, mais je vais jouer d’une variation comme l’auteur – et qu’il s’en sortait sacrément bien à chaque fois. Au final, si certaines nouvelles m’ont plus marqué que d’autres, c’est surtout parce qu’elles éveillèrent des souvenirs ou des références particulières.
En premier, « L’ennemi ancien » m’a captivé par son ambiance et sa tension extrêmement bien rendues. Ensuite, « Un conte de poivrot » m’a fait plus que sourire surtout avec la superbe phrase finale qui est cerise sur le gâteau. Moi qui n’aime pas vraiment le post-apo que je trouve suranné et usé jusqu’à la corde, j’ai été le temps d’une lecture réconcilié avec le genre grâce à « Les quatre saisons de l’apocalypse », une petite perle que cette histoire.
« Le grand tirage » et « Les successeurs » sont deux nouvelles qui – avec le conte de poivrot – mêlent SF, humour et cynisme en un dosage parfait. Quant à l’oppressant « Baphomet », il m’a fait repenser à plusieurs textes que j’avais lus étant ado ainsi qu’au roman « Le scarabée » de Richard Marsh (même si le récit n’a guère de rapport direct).
Outre la préface que j’avais préféré garder en final, car elle présentait trop bien chaque histoire, le recueil se termine sur une interview en dix questions à Serge Rollet qui permet d’en savoir un peu plus sur le « personnage ». Un chouette bonus.
À partir de là, il me restait à lire ledit fix-up et à tenter de survivre au « Dieu sans nom ».
Grâce à la petite invocation qu’il m’a « grabouillée » avec la dédicace, ça a marché : je suis toujours de ce monde – je sais, dommage pour vous, mais bon, c’est ainsi.
Et à cet instant, vous devriez vous apercevoir que j’ai écrit plusieurs phrases sans même parler du contenu du livre – exactement comme les hommes politiques pour faire patienter et trouver comment répondre à la question tordue qu’on vient de leur poser.
Quel rapport ? Eh bien, essayer d’évoquer ce recueil est chose ardue, tout simplement parce qu’Artikel Unbekannt [les germanophones s’y retrouveront] le fait parfaitement bien dans sa préface en balayant chaque histoire et en comparant l’auteur aux grandes plumes du fantastique. Ce qui signifie que vous n’avez pas le choix : vous devrez acquérir ledit ouvrage pour y découvrir la meilleure et la plus juste des « chroniques ».
Bon, d’accord, je vais faire un effort et m’y mettre moi aussi. Ce qui est quand même sacrément compliqué après cette préface, l’air de rien.
Commençons donc par le début avec le roman court qui a prêté son nom au recueil [à moins que ce ne soit le recueil qui ait piqué son titre à l’histoire sans lui demander l’autorisation] : celle du Dieu sans nom. Le point de départ ? Un dieu-démon est emprisonné dans une pyramide-cocon qui l’empêche de s’échapper pour asservir le monde. Mais boum badaboum, des anthropologues et archéologues viennent tout casser et libèrent l’être démoniaque qui n’a qu’une idée en tête : reconquérir la Terre et s’y installer après avoir éliminé les humains occupant indûment la place qu’il considère comme sienne. Heureusement, la société secrète des Medjaÿ va tout faire pour bloquer le retour de… Oups ! Non ! Erreur ! Ça, c’est « La Momie » avec Rick O’Connell et Evelyn Carnahan.
Bref, comme plusieurs autres textes dudit recueil, l’histoire est usée jusqu’à la corde, c’est du lu ou vu, relu ou revu… si ce n’est qu’un petit détail transforme tout. Un détail énorme même : l’auteur a rebattu les cartes et appose des dièses et des bémols exactement où il faut pour changer agréablement la musique. Et c’est là tout le plaisir de ces histoires : Serge Rollet nous les sert à sa sauce, mêlant fantastique – il ose nous décrire les monstres –, horreur – il n’hésite pas à faire jaillir tripes et hémoglobine où et quand il en faut –, action – Indy et « Dutch » Schaefer ne sont pas loin –, cynisme, humour, dérision, etc. jusqu’à nous bousculer à chaque fois par une fin abrupte, comme s’il nous poussait bien gentiment, mais fermement par-dessus le rebord de la falaise afin de mieux nous amener à apprécier le dessert.
Moi qui ai commencé ce livre en soupirant après quelques pages jusqu’à le reposer, je me suis retrouvé happé lorsque deux soirs plus tard, je l’ai de nouveau saisi. Revoir la Momie, version Grand Ancien à la place d’Imhotep avec une référence aux 7 plaies d’Égypte, m’a emballé au fur et à mesure que je dévorai les courts et incisifs chapitres.
Et la suite n’a en rien dépareillé, se révélant tout aussi excellente. D’abord parce que j’ai découvert dans « L’ennemi ancien » une reprise de Predator, version Grand Ancien là encore, qui m’a beaucoup plu et amusé avec une conclusion bien secouée comme le film. Ensuite parce que chaque histoire amène son lot de surprises.
Il m’est apparu que l’auteur savait faire flèches de plusieurs arcs – mon oreillette me susurre qu’il faut dire avoir plusieurs cordes à son arc, mais je vais jouer d’une variation comme l’auteur – et qu’il s’en sortait sacrément bien à chaque fois. Au final, si certaines nouvelles m’ont plus marqué que d’autres, c’est surtout parce qu’elles éveillèrent des souvenirs ou des références particulières.
En premier, « L’ennemi ancien » m’a captivé par son ambiance et sa tension extrêmement bien rendues. Ensuite, « Un conte de poivrot » m’a fait plus que sourire surtout avec la superbe phrase finale qui est cerise sur le gâteau. Moi qui n’aime pas vraiment le post-apo que je trouve suranné et usé jusqu’à la corde, j’ai été le temps d’une lecture réconcilié avec le genre grâce à « Les quatre saisons de l’apocalypse », une petite perle que cette histoire.
« Le grand tirage » et « Les successeurs » sont deux nouvelles qui – avec le conte de poivrot – mêlent SF, humour et cynisme en un dosage parfait. Quant à l’oppressant « Baphomet », il m’a fait repenser à plusieurs textes que j’avais lus étant ado ainsi qu’au roman « Le scarabée » de Richard Marsh (même si le récit n’a guère de rapport direct).
Outre la préface que j’avais préféré garder en final, car elle présentait trop bien chaque histoire, le recueil se termine sur une interview en dix questions à Serge Rollet qui permet d’en savoir un peu plus sur le « personnage ». Un chouette bonus.