Maurice Limat | Photo @ Dousset, 1971
Où est-il ?
En quel pays ?
En quel lieu ?
En quel univers ?
Le corps dans un gouffre noir.
Et lui – qui était-il alors puisqu’il n’avait plus de corps ?
Il continuait à avancer, mieux, à monter...
Une aurore...
Une aurore comme il n’y en a pas dans la Galaxie...
En quel pays ?
En quel lieu ?
En quel univers ?
Le corps dans un gouffre noir.
Et lui – qui était-il alors puisqu’il n’avait plus de corps ?
Il continuait à avancer, mieux, à monter...
Une aurore...
Une aurore comme il n’y en a pas dans la Galaxie...
Introduction
Maurice Limat nous a quittés le 21 janvier 2002. Avec lui, c’est un des auteurs français de romans populaires parmi les plus prolifiques et les plus contestés qui a pris “le chemin des éternelles aurores”. Afin de rendre hommage à cette personnalité discrète mais à plus d’un égard hors du commun, voici quelques informations et documents qui vous permettront de mieux le cerner, le positionner et peut-être, en vous incitant à lire certaines de ses œuvres, d’apprécier à leur juste valeur diverses facettes de son talent.
A propos de Maurice Limat
Né à Paris le 23 septembre 1914, dans une famille plutôt modeste, Maurice Limat a pour premier horizon la loge de concierge où on le confie quotidiennement. Excellente école de psychologie qui lui permet d’observer une maison et ses locataires ! Les études seront très tôt interrompues, pour raisons financières, et Maurice travaillera dès quatorze ans : métro-boulot-dodo, abrutissement total, sept ans dans la commission-export… avec des rêves permanents de théâtre et de littérature.
De son enfance, Maurice Limat conserve le souvenir de vacances campagnardes un peu solitaires passées à garder vaches et dindons. En guise de copains, quelques illustrés… Il fait aussi connaissance avec les fées et les génies qui hantent les buissons, tout en voyant évoluer sur les mares les escadres de la flibuste. La passion pour l’imaginaire et le roman d’aventures s’est installée, elle grandira encore durant l’adolescence.
À vingt-et-un ans, départ pour le service militaire et la Ligne Maginot. C’est pendant cette période que Maurice Limat écrit et publie sa première œuvre : un petit roman d’aventures. Quoi d’étonnant à cela ?
Au retour, notre homme se lance dans une carrière de comédien-auteur. Puis arrive la guerre avec la campagne de 1940 suivie de dix-huit mois de captivité, dont il rentrera en triste état.
Dix ans plus tard, il a déjà à son actif près de trois cents petits romans populaires ainsi qu’un nombre à peu près égal de contes et nouvelles ! Tous les genres sont abordés : l’aventure, le policier, le sentimental, le récit de cape et d’épée, de pirates, pour la jeunesse, la science-fiction, l’épouvante…
Après un roman-reportage sur la délinquance juvénile (“Rue des Mauvais Garçons”), Maurice Limat quitte en 1956 l’éditeur Ferenczi auquel il a fourni un nombre impressionnant d’ouvrages depuis 1935. Un livre aux Editions Métal (“S.O.S. Galaxie”) puis vient “Monsieur Cosmos”, au Grand Damier, avec lequel Maurice Limat signe un de ses premiers romans d’importance. Encore deux contributions chez cet éditeur et c’est, en 1959, l’entrée au Fleuve Noir Anticipation avec “Les Enfants du Chaos” (n°141). Le premier Fleuve Noir Angoisse de l’auteur, “Crucifie le Hibou” (n°81), sortira en 1961. La collaboration de Maurice Limat avec le Fleuve Noir durera jusqu’en 1974 pour Angoisse (“Méphista et le Chien Hurlamor”, n°252) qui s’arrêtera peu après avec son n°261 ; celle pour Anticipation s’achèvera fin 1987 avec “Atoxa-des-Abysses” (n°1599). C’est l’année où le Fleuve vire presque tous ses “Grands Anciens” – à l’exception de Jimmy Guieu qui survivra encore quelque temps – mais en rééditera certains, dont Limat, dans la petite collection “Les Maîtres Français de la S.F.” dirigée par Guieu, série qui mourra avec son n°38 en 1991.
Entre 1975 et 1985 les collections Super Luxe Fleuve Noir, “Lendemains Retrouvés” en S.F. et “Horizons de l’Au-delà” en Fantastique, rééditent un nombre non négligeable de romans de Maurice Limat issus respectivement d’Anticipation (à l’exception de “La Planète sans Soleil”, parue en 1956 au Grand Damier) et d’Angoisse. Fin des années 1970, les éphémères Editions du Triangle animées par Richard-Bessière proposent aussi “Monsieur Cosmos” et “La Planète sans Soleil”. En 1979, le Corrézien Roger Garry publie, en “Mémoires d’Outre-Ciel”, un récit d’angoisse fantastique intitulé “Ecoutez la Nuit” dû à un certain Lionel Rex – en réalité, Maurice Limat sous un de ses multiples pseudonymes… Garry récidive en 1981 avec “La Maison du Frisson”, sous le nom de Jean Scapin : une aventure de Teddy Vérano dans laquelle l’identité du héros est évidemment modifiée.
Faisons un décompte rapide : si la bibliographie de Maurice Limat (et alias) comporte plus de 700 œuvres, nous lui devons 106 Anticipation – dont le 1000ème volume de la collection, “Le Zénith… et après ?”, place honorifique attribuée par l’éditeur, en accord avec ses autres auteurs, à l’un des plus vénérables – et 33 Angoisse ainsi que 2 “Grands Romans”, “Le Carnaval de Satan” et “Par le Fer et la Magie”. Aux dires des gens de L’Œil du Sphinx qui, en 2000 et 2001, ont eu plusieurs contacts intéressants et sympathiques avec Limat, ses armoires regorgeaient de manuscrits qui resteront sans lecteur et son carnet de bord contenait nombre de “titres fantômes” de livres pas encore écrits…
L’homme Limat, depuis sa résidence des hauteurs de Belleville, ne s’est pas limité à cela. Sa collaboration à la presse fut abondante (de “Paris-Soir” au “Journal du Parlement” en passant par “Jean-Pierre”, “Nous Deux”, “Ciné-Révélation”, “Boléro”, “Eve”, “Marius”, “Le Hérisson”, “La Gazette Agricole”, “L’Intrépide”, “Coq Hardi”, etc…). Il donna plusieurs nouvelles à “Galaxie”, produisit quelques textes pour B.D., tint de nombreuses conférences notamment au Club du Faubourg, s’occupa même d’aumônerie des prisons… On lui doit également une quinzaine de pièces au Théâtre du Petit-Monde, un drame au Grand-Guignol, une pièce radiophonique, des revues pour les Fêtes de la Ville de Paris… Sans oublier, dans les années 50 à 70, la contribution qu’eut Maurice Limat à la croissance de la S.F. populaire française par l’intermédiaire d’une véritable école dont il faisait partie avec d’autres écrivains.
De plus, son renom ne se limita pas seulement à la France puisque certains de ses livres furent presque immédiatement traduits à l’étranger : en espagnol, en italien, en portugais, en allemand, en néerlandais, en flamand, en tchèque, en grec. D’ailleurs, un tour rapide sur le Web international prouve aujourd’hui encore qu’on est loin de l’y avoir oublié !
En S.F., les ouvrages de Maurice Limat restent marqués par une vision optimiste : notre monde va certes vers son autodestruction, mais il s’ensuivra une ère de renouveau. Le Bien, les bons finissent toujours par l’emporter, par résoudre les mystères les plus incroyables et par vaincre les forces négatives – qu’elles soient d’origine humaine ou issues d’autres univers. Les héros récurrents sont simples, bien typés, à la limite du cliché : Bruno Coqdor, le Chevalier de la Terre, Robin Muscat, le “cher flic des étoiles”, le plus rare Luc Delta, pilote d’essais et aventurier spatial. À noter l’importance que l’auteur accorde aux pouvoirs de l’esprit et aux facultés paranormales : Coqdor est par ailleurs un médium remarquable, hypnosuggesteur s’il le faut… alors que c’est un personnage de Space Opera ! Mais le Space Opera “à la Limat” n’hésite pas à mobiliser l’occulte et le surnaturel. A contrario, Teddy Vérano, “le détective des fantômes” (né en 1936 dans le premier policier de Limat, “La Villa aux Squelettes”), sera en Angoisse un individu tout à fait ordinaire dénué de la moindre parcelle de talent psi. Etrange et quelque peu paradoxal pour un chasseur de spectres… mais anomalie bien compensée par Edwige Hossegor, l’actrice centrale des “Méphista”, lorsqu’elle entre dans une véritable dualité avec le personnage infernal qu’elle incarne à la scène, luttant tout autant contre elle-même que contre les puissances du Mal.
En synthèse, si Maurice Limat n’a guère renouvelé le domaine de la S.F. par ses aventures spatiales style ancien ou ses Fantasy un peu poussives, mêlant à tout cela des ingrédients irrationnels qui tranchent parfois trop mais s’associent bien à ses extravagances scientifiques, il a fort bien réussi dans le fantastique en actualisant des thèmes archi-classiques liés à la tradition ésotérique, à la magie, à la sorcellerie et aux grandes croyances populaires, les rénovant en des transpositions modernes souvent intéressantes. Et toujours, sous-jacente, transparaît “la fraîcheur du jeune homme qui préférait le rêve à la grisaille d’un couloir de métro”…
Rappelons pour terminer que Maurice Limat fut aussi orfèvre en matière de mots, qu’il possédait un vocabulaire très riche, se plaisait à inventer de belles sonorités dans ses noms exotiques et se révéla aussi un brillant créateur de néologismes, à preuve : un monde philohumain, les coplanétriotes, raplanétrier, les cosmatelots, le Spalax, l’intracorol, le Martervénux… Il y aurait là matière à un lexique conséquent !
De son enfance, Maurice Limat conserve le souvenir de vacances campagnardes un peu solitaires passées à garder vaches et dindons. En guise de copains, quelques illustrés… Il fait aussi connaissance avec les fées et les génies qui hantent les buissons, tout en voyant évoluer sur les mares les escadres de la flibuste. La passion pour l’imaginaire et le roman d’aventures s’est installée, elle grandira encore durant l’adolescence.
À vingt-et-un ans, départ pour le service militaire et la Ligne Maginot. C’est pendant cette période que Maurice Limat écrit et publie sa première œuvre : un petit roman d’aventures. Quoi d’étonnant à cela ?
Au retour, notre homme se lance dans une carrière de comédien-auteur. Puis arrive la guerre avec la campagne de 1940 suivie de dix-huit mois de captivité, dont il rentrera en triste état.
Dix ans plus tard, il a déjà à son actif près de trois cents petits romans populaires ainsi qu’un nombre à peu près égal de contes et nouvelles ! Tous les genres sont abordés : l’aventure, le policier, le sentimental, le récit de cape et d’épée, de pirates, pour la jeunesse, la science-fiction, l’épouvante…
Après un roman-reportage sur la délinquance juvénile (“Rue des Mauvais Garçons”), Maurice Limat quitte en 1956 l’éditeur Ferenczi auquel il a fourni un nombre impressionnant d’ouvrages depuis 1935. Un livre aux Editions Métal (“S.O.S. Galaxie”) puis vient “Monsieur Cosmos”, au Grand Damier, avec lequel Maurice Limat signe un de ses premiers romans d’importance. Encore deux contributions chez cet éditeur et c’est, en 1959, l’entrée au Fleuve Noir Anticipation avec “Les Enfants du Chaos” (n°141). Le premier Fleuve Noir Angoisse de l’auteur, “Crucifie le Hibou” (n°81), sortira en 1961. La collaboration de Maurice Limat avec le Fleuve Noir durera jusqu’en 1974 pour Angoisse (“Méphista et le Chien Hurlamor”, n°252) qui s’arrêtera peu après avec son n°261 ; celle pour Anticipation s’achèvera fin 1987 avec “Atoxa-des-Abysses” (n°1599). C’est l’année où le Fleuve vire presque tous ses “Grands Anciens” – à l’exception de Jimmy Guieu qui survivra encore quelque temps – mais en rééditera certains, dont Limat, dans la petite collection “Les Maîtres Français de la S.F.” dirigée par Guieu, série qui mourra avec son n°38 en 1991.
Entre 1975 et 1985 les collections Super Luxe Fleuve Noir, “Lendemains Retrouvés” en S.F. et “Horizons de l’Au-delà” en Fantastique, rééditent un nombre non négligeable de romans de Maurice Limat issus respectivement d’Anticipation (à l’exception de “La Planète sans Soleil”, parue en 1956 au Grand Damier) et d’Angoisse. Fin des années 1970, les éphémères Editions du Triangle animées par Richard-Bessière proposent aussi “Monsieur Cosmos” et “La Planète sans Soleil”. En 1979, le Corrézien Roger Garry publie, en “Mémoires d’Outre-Ciel”, un récit d’angoisse fantastique intitulé “Ecoutez la Nuit” dû à un certain Lionel Rex – en réalité, Maurice Limat sous un de ses multiples pseudonymes… Garry récidive en 1981 avec “La Maison du Frisson”, sous le nom de Jean Scapin : une aventure de Teddy Vérano dans laquelle l’identité du héros est évidemment modifiée.
Faisons un décompte rapide : si la bibliographie de Maurice Limat (et alias) comporte plus de 700 œuvres, nous lui devons 106 Anticipation – dont le 1000ème volume de la collection, “Le Zénith… et après ?”, place honorifique attribuée par l’éditeur, en accord avec ses autres auteurs, à l’un des plus vénérables – et 33 Angoisse ainsi que 2 “Grands Romans”, “Le Carnaval de Satan” et “Par le Fer et la Magie”. Aux dires des gens de L’Œil du Sphinx qui, en 2000 et 2001, ont eu plusieurs contacts intéressants et sympathiques avec Limat, ses armoires regorgeaient de manuscrits qui resteront sans lecteur et son carnet de bord contenait nombre de “titres fantômes” de livres pas encore écrits…
L’homme Limat, depuis sa résidence des hauteurs de Belleville, ne s’est pas limité à cela. Sa collaboration à la presse fut abondante (de “Paris-Soir” au “Journal du Parlement” en passant par “Jean-Pierre”, “Nous Deux”, “Ciné-Révélation”, “Boléro”, “Eve”, “Marius”, “Le Hérisson”, “La Gazette Agricole”, “L’Intrépide”, “Coq Hardi”, etc…). Il donna plusieurs nouvelles à “Galaxie”, produisit quelques textes pour B.D., tint de nombreuses conférences notamment au Club du Faubourg, s’occupa même d’aumônerie des prisons… On lui doit également une quinzaine de pièces au Théâtre du Petit-Monde, un drame au Grand-Guignol, une pièce radiophonique, des revues pour les Fêtes de la Ville de Paris… Sans oublier, dans les années 50 à 70, la contribution qu’eut Maurice Limat à la croissance de la S.F. populaire française par l’intermédiaire d’une véritable école dont il faisait partie avec d’autres écrivains.
De plus, son renom ne se limita pas seulement à la France puisque certains de ses livres furent presque immédiatement traduits à l’étranger : en espagnol, en italien, en portugais, en allemand, en néerlandais, en flamand, en tchèque, en grec. D’ailleurs, un tour rapide sur le Web international prouve aujourd’hui encore qu’on est loin de l’y avoir oublié !
En S.F., les ouvrages de Maurice Limat restent marqués par une vision optimiste : notre monde va certes vers son autodestruction, mais il s’ensuivra une ère de renouveau. Le Bien, les bons finissent toujours par l’emporter, par résoudre les mystères les plus incroyables et par vaincre les forces négatives – qu’elles soient d’origine humaine ou issues d’autres univers. Les héros récurrents sont simples, bien typés, à la limite du cliché : Bruno Coqdor, le Chevalier de la Terre, Robin Muscat, le “cher flic des étoiles”, le plus rare Luc Delta, pilote d’essais et aventurier spatial. À noter l’importance que l’auteur accorde aux pouvoirs de l’esprit et aux facultés paranormales : Coqdor est par ailleurs un médium remarquable, hypnosuggesteur s’il le faut… alors que c’est un personnage de Space Opera ! Mais le Space Opera “à la Limat” n’hésite pas à mobiliser l’occulte et le surnaturel. A contrario, Teddy Vérano, “le détective des fantômes” (né en 1936 dans le premier policier de Limat, “La Villa aux Squelettes”), sera en Angoisse un individu tout à fait ordinaire dénué de la moindre parcelle de talent psi. Etrange et quelque peu paradoxal pour un chasseur de spectres… mais anomalie bien compensée par Edwige Hossegor, l’actrice centrale des “Méphista”, lorsqu’elle entre dans une véritable dualité avec le personnage infernal qu’elle incarne à la scène, luttant tout autant contre elle-même que contre les puissances du Mal.
En synthèse, si Maurice Limat n’a guère renouvelé le domaine de la S.F. par ses aventures spatiales style ancien ou ses Fantasy un peu poussives, mêlant à tout cela des ingrédients irrationnels qui tranchent parfois trop mais s’associent bien à ses extravagances scientifiques, il a fort bien réussi dans le fantastique en actualisant des thèmes archi-classiques liés à la tradition ésotérique, à la magie, à la sorcellerie et aux grandes croyances populaires, les rénovant en des transpositions modernes souvent intéressantes. Et toujours, sous-jacente, transparaît “la fraîcheur du jeune homme qui préférait le rêve à la grisaille d’un couloir de métro”…
Rappelons pour terminer que Maurice Limat fut aussi orfèvre en matière de mots, qu’il possédait un vocabulaire très riche, se plaisait à inventer de belles sonorités dans ses noms exotiques et se révéla aussi un brillant créateur de néologismes, à preuve : un monde philohumain, les coplanétriotes, raplanétrier, les cosmatelots, le Spalax, l’intracorol, le Martervénux… Il y aurait là matière à un lexique conséquent !
Mes premières rencontres avec la SF française
Dans mon cas personnel, le nom de Maurice Limat reste attaché à mes premières rencontres avec la S.F. française et au début de mes plongées dans l’abondant courant du Fleuve Noir Anticipation. Ce n’est pas un de ses romans qui m’a fait découvrir la collection (mais le 4ème Perry Rhodan, “Bases sur Vénus”), le premier “Fleuve” que j’ai lu jusqu’au bout n’était pas un des siens (il s’agissait de “Cerveaux sous Contrôle”, de Richard-Bessière), mais le tour de Limat est venu juste après avec “Le Soleil de Glace”. Nous étions à l’automne 1966...
Pour un gamin de huit ans, les titres des livres avaient alors quelque chose de vraiment magique : “Le Dieu Couleur de Nuit”, “Les Oiseaux de Véga”, “Les Portes de l’Aurore” (duquel est extraite la citation en préambule à cet article), “La Nuit des Géants”, par exemple. Reconnaissons que ceux des ouvrages de Limat étaient le plus souvent fort bien choisis et sonnants ! Quant au contenu parfois hétéroclite, il alliait systématiquement l’aventure, le rêve et les images à des idées fortes axées sur les mystères de l’Univers, même si les trames s’avéraient assez linéaires et, disons-le, répétitives.
Au fil du temps, toujours au sein généreux d’Anticipation, j’ai préféré d’autres auteurs et vu évoluer mon approche des textes de Limat : l’âge venant, ils s’avéraient de plus en plus simplistes, enfantins par certains côtés, agaçants par les clichés et le style ampoulé, usés à cause de la thématique et du schéma narratif, quelquefois truffés d’impossibilités scientifiques et d’incohérences délirantes à la limite du risible – mais néanmoins attachants par certaines surprises et par une poignée de personnages récurrents, des sortes de vieux copains toujours retrouvés avec plaisir.
Tenir entre les mains la dernière production de Maurice Limat ravivait systématiquement une petite étincelle et annonçait un moment tout teinté de nuances. À l’occasion, le résultat s’avérait d’ailleurs dépasser les modestes espérances initiales : “La Lumière d’Ombre”, “La Cloche de Brume”, “La Légende Future” (mêlant adroitement le Space Opera et le spiritisme), “La Croix de Flamme” (transposition du mythe du Hollandais Volant) en furent de bons exemples.
En parallèle, je n’ai eu de cesse de mettre la main sur tous les vieux Anticipation de l’auteur qui manquaient à ma collection, puis me suis lancé dans la même quête pour ses Angoisse – à la lecture souvent bien plus convaincants que les écrits purement S.F. de Limat qui, avec le temps, lorgnait de plus en plus fréquemment du côté d’une Fantasy pas toujours transcendante. Citons par exemple, pour illustrer le registre fantastique, “Batelier de la Nuit”, “Chantespectre”, “La Maléficio”, “Méphista et la Lanterne des Morts”…
Pour un gamin de huit ans, les titres des livres avaient alors quelque chose de vraiment magique : “Le Dieu Couleur de Nuit”, “Les Oiseaux de Véga”, “Les Portes de l’Aurore” (duquel est extraite la citation en préambule à cet article), “La Nuit des Géants”, par exemple. Reconnaissons que ceux des ouvrages de Limat étaient le plus souvent fort bien choisis et sonnants ! Quant au contenu parfois hétéroclite, il alliait systématiquement l’aventure, le rêve et les images à des idées fortes axées sur les mystères de l’Univers, même si les trames s’avéraient assez linéaires et, disons-le, répétitives.
Au fil du temps, toujours au sein généreux d’Anticipation, j’ai préféré d’autres auteurs et vu évoluer mon approche des textes de Limat : l’âge venant, ils s’avéraient de plus en plus simplistes, enfantins par certains côtés, agaçants par les clichés et le style ampoulé, usés à cause de la thématique et du schéma narratif, quelquefois truffés d’impossibilités scientifiques et d’incohérences délirantes à la limite du risible – mais néanmoins attachants par certaines surprises et par une poignée de personnages récurrents, des sortes de vieux copains toujours retrouvés avec plaisir.
Tenir entre les mains la dernière production de Maurice Limat ravivait systématiquement une petite étincelle et annonçait un moment tout teinté de nuances. À l’occasion, le résultat s’avérait d’ailleurs dépasser les modestes espérances initiales : “La Lumière d’Ombre”, “La Cloche de Brume”, “La Légende Future” (mêlant adroitement le Space Opera et le spiritisme), “La Croix de Flamme” (transposition du mythe du Hollandais Volant) en furent de bons exemples.
En parallèle, je n’ai eu de cesse de mettre la main sur tous les vieux Anticipation de l’auteur qui manquaient à ma collection, puis me suis lancé dans la même quête pour ses Angoisse – à la lecture souvent bien plus convaincants que les écrits purement S.F. de Limat qui, avec le temps, lorgnait de plus en plus fréquemment du côté d’une Fantasy pas toujours transcendante. Citons par exemple, pour illustrer le registre fantastique, “Batelier de la Nuit”, “Chantespectre”, “La Maléficio”, “Méphista et la Lanterne des Morts”…
Une invitation au voyage toujours renouvelée
Au bilan final, que laissent dans ma mémoire ces presque trente-cinq ans de parcours partiel d’une production littéraire si abondante ? Je crois que c’est surtout le sentiment d’une invitation au voyage toujours renouvelée, d’un départ systématique vers “le merveilleux d’un monde où se côtoient des héros simples et droits ainsi que des créatures d’autres univers”, l’appel à “l’âme du naïf amoureux de récits d’aventure” et à “la fraîcheur du lecteur tout neuf ”. Pas mal d’émotion, beaucoup de rêve le temps d’un récit d’évasion – à condition de ne pas céder à trop d’esprit critique négatif et de ne pas chercher à trouver là plus que ce qu’il n’y a en réalité. Maurice Limat voulait divertir ses lecteurs, il y est allègrement parvenu même si “la quantité n’a jamais signifié constance dans le chef d’œuvre impérissable”. Et il faut se rappeler une de ses citations les plus percutantes : “Le contraire d’un auteur populaire, c’est un auteur impopulaire”. Qu’importe donc la voix des critiques souvent féroces ? Il y avait chez Limat une certaine grandeur, un souffle incontestable, une juxtaposition parfois réussie de grotesque et de sublime – presque hugolienne par moments – alliés à l’humanisme, à la foi en l’individu et en des valeurs certes manichéennes mais fondamentales. Rien qui ne laisse indifférent, pour conclure, mais conforte bien mon regret très personnel de n’avoir jamais pu rencontrer Maurice Limat...