Mémoires des abysses

Par | 02/05/2023 | Lu 492 fois




Le SS Arctic (lithographie de 1850) | Par N. Currier (New York company) — U.S. mail steam ship Arctic, from an original 1850 lithograph by N. Currier, Prints and Photographs Online Catalogue, U.S. Library of Congress, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=6453511
« Dernièrement, j’ai entendu parler d’une ancienne fratrie de navires concurrents américains. Ceux-ci appartenaient à la compagnie Collins Line qui à l’époque du milieu du 19ème siècle était la principale adversaire de cette satanée Cunard Line qui nous donne toujours en ce moment bien des soucis. D’ailleurs, à ce propos si je l’avais connue, l’adversaire de mon adversaire aurait-elle été mon alliée ?

Je dis bien aurait car, bien que grande innovatrice en matière de propulsion à vapeur, cette compagnie fondée en 1818 par Edward Collins n’a malheureusement vécu que 40 ans.

Parmi sa flotte, quatre navires jumeaux gigantesques pour l’époque ont vu le jour. Il s’agissait des SS Atlantic (le premier), Baltic, Pacific et Arctic ; tous construits avec des coques en bois et équipés de roues à aubes entrainées par de puissants moteurs à vapeur.

Le plus luxueux d’entre eux était le SS Arctic qui pouvait faire la traversée New-York - Liverpool en 10 jours ; une prouesse pour l’époque qui a donné des sueurs froides à la Cunard qui elle, possédait déjà des navires à coques métalliques mais plus petits et moins confortables.

Il fut lancé en 1850 et faisait 87m de long pour 14m de largeur. Avec ses deux moteurs de 1000 chevaux-vapeur, sa vitesse atteignait les 12 nœuds.

Parti de Liverpool le 20 septembre 1854 et se dirigeant vers New-York, l'Arctic embarquait 400 âmes à son bord dont 130 membres d’équipage. Sept jours plus tard, ce luxueux bâtiment entrait dans un brouillard à couper au couteau.

Trop confiant en son navire, il semblerait que l’équipage ait été trop ambitieux et avide de gagner le fameux trophée de vitesse transatlantique appelé Ruban bleu. En effet, un bateau de pêche français - le Vesta - croisait la trajectoire de l’Américain et la collision fut inévitable.

Avant de prendre conscience de ses propres dégâts, l’équipage de l’Arctic avait voulu porter secours au Français qui venait pourtant de l’éperonner.

C’est finalement en abandonnant le Vesta et trois de ses chaloupes de sauvetage que l’Arctic mit le cap sur Terre-Neuve. La tentative se révélant infructueuse et la cohue s’étant généralisée à bord, les membres d’équipage - pris de panique - sont entrés en conflit avec les passagers au vu du nombre insuffisant de canots de sauvetage.

Le navire transatlantique a coulé en 4 heures avec la perte d’autres chaloupes parmi les 5 restantes ainsi qu’un radeau de fortune qui accueillait 72 malheureux passagers.

Au total et après 3 jours de recherche, seuls 88 rescapés sur les 400 personnes ont survécu dont principalement des membres d’équipage qui avaient pris place en priorité dans les canots au détriment des femmes et des enfants dont parait-il, il n’y eut aucun survivant.

Le naufrage du SS Arctic est considéré comme la plus grande catastrophe maritime transatlantique.

L’un de ses frères jumeaux, le Pacific, a également disparu 2 ans plus tard dans des circonstances inconnues. Il aurait percuté un iceberg.

Toujours plus grand et surtout toujours plus vite, telle est la devise de l’homme dans sa quête de profits et de gloire maritime.

Tout cela s’est passé il y a plus 60 ans et croyez-moi, cette devise n’a pas changé. Aujourd’hui c’est moi le plus grand et ce 10 avril, c’est le jour de mon voyage inaugural. Je dois vous laisser, ils viennent de mettre mes turbines en marche… cap sur New-York… »
Illustration du naufrage du SS Arctic | Par James E. Buttersworth (artist) 1817-1894, domaine public https://fr.wikipedia.org/wiki/SS_Arctic#/media/Fichier:Wreck_of_the_U.S.M._steam_ship_%22Arctic%22_(one-third-size).png

Copyright @ Christobal Columbus pour Le Galion des Etoiles. Tous droits réservés. En savoir plus sur cet auteur