Mon nom est Sark. Cutty Sark !

Par | 05/05/2024 | Lu 822 fois


Je ne m'attendais pas à ce que cet historien maritime du Galion des Etoiles, Christobal Columbus, pense à moi !

Moi qui suis en retraite depuis 1954 - quoique, être un musée n'est pas de tout repos - je vais vous raconter mon parcours...



Le navire musée Cutty Sark en cale sèche au bord de la Tamise de Londres @ Tony Hisgett from Birmingham, UK — Cutty Sark 4Uploaded by tm, CC BY 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=27909284
Mon nom est Cutty Sark. Je suis l'un des derniers grands voiliers destinés au commerce et plus précisément à l'importation de thé au Royaume-Uni. C'est vous dire l'importance qu'avaient mes missions !

J'ai vu le jour à la demande de John Willis dit Jock (1817-1899). On le surnommait « le vieux Jock ». Ancien marin devenu armateur, il a créé des navires de commerce pour le thé de Chine et de laine d'Australie.

Si mon confrère français le Belem navigue toujours depuis sa construction en 1896, il faut savoir que je suis plus vieux que lui. En effet, je suis né en 1869 et, avec mes 65m de coque en bois et 11m de largeur pour 900 tonnes, je suis également plus grand. Je vous avouerai cependant que je possède une double coque de renfort en cuivre enveloppant toute la partie de mon tirant d'eau. Là où je trône aujourd'hui, j'ai d'ailleurs été surélevé afin que les visiteurs de mon musée puissent admirer ma fière et longue coque dorée en passant par dessous.

La coque dorée du Cutty Sark @ LondonHistoryatHome — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=109497889
Mon nom est inspiré d'une sorcière ensorceleuse sortie d'un poème de Robert Burns : Tam o' Shanter.

Cette sorcière a certainement fait secrètement partie de mon équipage durant quelques années car je n'ai pas eu que de bons capitaines. Après le premier - nommé George Moodie - qui avait réussi la prouesse en pleine mer de remplacer mon gouvernail cassé par un autre de fortune, confectionné avec les moyens du bord, ses successeurs ont connu bien des déboires. Le premier remplaçant (Moor) n'a fait qu'un voyage suite à ses résultats médiocres, le suivant (Tiptaft) est décédé d'une crise cardiaque à Shangaï, Wallace était un pitoyable chef, ce qui engendra une mutinerie à mon bord suite au meurtre d'un matelot par le capitaine en second. Wallace s’est finalement suicidé par noyade en pleine course pour le thé. Bruce, le suivant, était un véritable ivrogne. Bref, on peut dire que j'ai été dans le creux de la vague jusqu'en 1885. Fort heureusement, Woodget m'a fait retrouver ma place de meneur maritime durant dix ans avec mes allées et venues d'Australie.

Comme pour la plupart des grands voiliers, la force-vapeur a eu raison de mon moi. Ainsi, en 1895 le vieux Jock m'a vendu à un Portugais qui m'a rebaptisé Ferreira.

Le capitaine Richard Woodget à la barre @ Karen Roe from Bury St Edmunds, Suffolk, UK — Cutty Sark 26-06-2012Uploaded by Oxyman, CC BY 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=22373456
J'ai ensuite assuré un autre service en Afrique du Sud comme transbordeur sous le nom de Maria do Amparo, période durant laquelle ils m'ont ôté mes mâts ! Une période humiliante pour moi, vous pensez bien !

En 1922, par chance, j'ai été racheté par un compatriote britannique : le capitaine Dowman. Il m'a rééquipé de mon fier gréement pour servir de navire-école pour la marine marchande.

Je suis devenu un navire musée à partir de 1954 et je dois dire que la chance ma suivi jusqu'à aujourd'hui. En effet, j'ai été classé au patrimoine de l'UNESCO en 1997 ce qui a très certainement permis de me sauver lors de l’incendie de 2007, période durant laquelle j'étais en rénovation (normalement de 2006 à 2009). Je n'ai retrouvé ma fierté qu'à la fin de mes réparations en 2012.
 
Aujourd'hui, tels le Belem en France et le Mercator en Belgique, j'ai ce grand honneur de faire partie des dignes représentants encore présents de l'époque de gloire des grands navires à voiles de la marine marchande !

Je vous invite à venir me rendre une petite visite : je suis à Londres à la rue King William Walk, au quartier de Greenwich !

Le Cutty Sark en 2012 après les réparations @ Lauair — I took this photo in June 2012.Previously published: N/A, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=20546126

On parle aussi de moi dans la musique !

Le groupe de rock anglais Dire Straits, qui est l'un des groupes préférés du capitaine du Galion des Etoiles (si ce n'est pas un heureux hasard, ça ?), me cite dans l'une de ses chansons intitulée Single Handed Sailor de l'album Communiqué (1979).

J'en suis à la fois très touché et très fier ! 

Voici ce que chante Mark Knopfler, le leader, chanteur et guitariste du groupe, dans l'une des strophes de la chanson :
Yeah, and on a night when the lazy wind is a wailing
Around the Cutty Sark
The single handed sailor goes sailing
Sailing away in the dark
 
« Ouais, et lors d’une nuit où le vent paresseux gémit autour du Cutty Sark, le marin solitaire part naviguer, s’éloignant en pleine obscurité… »

Références et liens utiles

👉 L'ouvrage Navires de Mémoire (Guy Le Moing, éditions Ancre de Marine)
👉 Cutty Sark — Wikipédia (wikipedia.org)
👉 Royal Museums Greenwich - Wikipedia
👉 Royal Museums Greenwich (site officiel)

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