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Avant que le monde ne se ferme | Alain Mascaro | 2021

Par | 27/02/2024 | Lu 1578 fois




Avant que le monde ne se ferme @ 2021 Éditions Autrement | Conception graphique et illustration @ Raphaëlle Faguer | Photo @ Djackdah Riker
Avant que le monde ne se ferme @ 2021 Éditions Autrement | Conception graphique et illustration @ Raphaëlle Faguer | Photo @ Djackdah Riker

Illustration et quatrième de couverture

Anton Torvath est tzigane et dresseur de chevaux. Né au cœur de la steppe kirghize peu après la Première Guerre mondiale, il grandit au sein d’un cirque, entouré d’un clan bigarré de jongleurs, de trapézistes et de dompteurs. Ce « fils du vent » va traverser la première moitié du « siècle des génocides », devenant à la fois témoin de la folie des hommes et mémoire d’un peuple sans mémoire. Accompagné de Jag, l’homme au violon, de Simon, le médecin philosophe, ou de la mystérieuse Yadia, ex-officier de l’Armée rouge, Anton va voyager dans une Europe où le bruit des bottes écrase tout. Sauf le souffle du vent.

À la fois épopée et récit intime, Avant que le monde ne se ferme est un premier roman à l’écriture ample et poétique. Alain Mascaro s’empare du folklore et de la sagesse tziganes comme pour mieux mettre à nu la barbarie du monde.

Alain Mascaro est né en 1964. Professeur de lettres à Vichy, il décide en 2019 de tout quitter pour s'en aller parcourir le monde. Ce long voyage sans date de retour lui aura permis d'écrire son premier roman.

Anecdote personnelle

Avant de commencer à parler du livre, il faut que je vous raconte une petite histoire. Celle d'un gamin, qui au début des années 90, lit énormément de comics pris dans la collection de son oncle (les parutions Lug des année 80, Strange et ses déclinaisons, les Récits Complet Marvel, Titans, etc.) mais très peu de livres. Début d'année de cinquième, un jeune professeur de français (pas 30 ans) arrive au collège et, lors du premier cours, remet à tous les élèves une feuille A4 recto verso, qui se trouve être une liste de livres à lire. Frayeur des élèves, il y a au moins 200 titres ! Il est malade, on ne lira jamais tout ça dans l'année… Cependant, frayeur vite levée : c'est une liste d'œuvres qu'il juge importantes d'avoir lu dans sa vie. Ouf, nous voilà soulagés !
 
Cette liste contient des noms d’auteurs assez connus : Zola, Hugo, d'autres déjà cités en sixième, du très classique. Mais au milieu, d’autres noms vont changer ma vie à jamais : Asimov, Herbert, Tolkien, King, etc… Mon oncle, celui-là même qui possède les comics, me met dans les mains les livres de SF/Fantasy proposés sur cette liste. A partir de là, rien ne fut plus jamais pareil.
 
Durant des années, le souvenir de ce prof restera profondément ancré dans ma mémoire (il ne fit qu'une seule année dans mon collège) : l'image de le voir lire un poche de Stephen King lors d'une interro écrite, la découverte avec lui d'une salle de montage vidéo inutilisée au dernier étage du collège et bien d'autres souvenirs.
 
Des années plus tard, grâce à des jeunes étudiants venant travailler l'été dans mon entreprise, je découvre qu'il a enseigné dans le lycée principal de la ville. Chacun de ces jeunes, avec qui j'en parle, est lui aussi profondément marqué par cet incroyable professeur. On est en 2021, et j'apprends qu'il est parti parcourir le monde. Il tient un journal de voyage (https://transhumances.eu/) et durant les confinements liés au Covid, il a écrit un livre (son bureau d'écriture fut notamment une plage en Thaïlande) qui vient de sortir. De plus, il est de passage dans la ville pour une séance de dédicaces ! Je ne peux faire autrement que d’y aller et me procurer son livre. Ce dernier rejoint ma PAL. De nombreuses autres lectures font que je ne l'ouvre pas de suite. Ce livre obtient de nombreux prix littéraires (près de 20 à ce jour) et je ne l'ouvre réellement qu'aujourd'hui, début de vacances de février 2024…


Fiche de lecture

Et maintenant que j’ai partagé avec vous ce moment de ma vie, voici mon ressenti à la lecture de ce livre.

Je crois que c'est la première fois de ma vie que cela m'arrive… Sentir des larmes couler alors que je lis, sentir ma gorge se nouer, ressentir en même temps une immense tristesse et une joie irrépressible. La tristesse qui atteint son paroxysme au moment de la libération du camp, après avoir traversé toutes les épreuves du ghetto, d’Auschwitz, de la mort. La joie de retrouver ce son de violon si cher au cœur d’Anton et la voix de cette chanteuse qui le bouleverse avant de comprendre pourquoi.

Je ne suis qu'à la moitié du livre, je n'ai pas levé les yeux une seule fois depuis que je me suis installé dans mon fauteuil pour un petit moment de lecture, deux heures plus tôt, happé par la vie d’Anton, racontée avec une telle justesse que j'ai l'impression de lire une autobiographie. Je suis hors du temps ; seule me ramène au monde réel l’heure de manger avec mon épouse et les enfants.

Vite, je dois retourner en Inde, retrouver Anton, et connaître la suite de son destin.

Le repas terminé, je reprends ma lecture. Le hasard m'a vraiment fait faire une pause à un passage charnière de l’histoire. Cette deuxième partie narre la renaissance, les retrouvailles. Elle est une ode à la vie. C'est aussi le récit d'un voyage, physique mais aussi spirituel, un retour à la vie après l'enfer vécu.

Rarement un livre m'aura fait un tel effet ! Je retrouve le professeur de lettres, avec une écriture fine et recherchée, mais jamais lourde. Je découvre aussi le voyageur et, je suppose qu'une partie des descriptions vient de son voyage même.

Comme le répète le coach de mon fils : « Il faut savoir sortir de sa zone de confort. » Eh bien, je ne pensais pas qu'un « simple » livre me le ferait autant faire. Mes lectures sont rarement hors Imaginaire, néanmoins, celle-ci risque de laisser une empreinte en moi aussi forte que la rencontre il y a presque 30 ans avec son auteur.

Merci, Monsieur Mascaro ! 


Djackdah Riker
Copyright @ Djackdah Riker pour Le Galion des Etoiles. Tous droits réservés. En savoir plus sur cet auteur

𝗟𝗘 𝗚𝗔𝗟𝗜𝗢𝗡 𝗗𝗘𝗦 𝗘𝗧𝗢𝗜𝗟𝗘𝗦 𝗘𝗦𝗧 𝗨𝗡 𝗦𝗜𝗧𝗘 𝗦𝗔𝗡𝗦 𝗣𝗨𝗕𝗟𝗜𝗖𝗜𝗧É. 𝗩𝗼𝘂𝘀 𝗮𝗶𝗺𝗲𝘇 𝗻𝗼𝘀 𝗮𝗿𝘁𝗶𝗰𝗹𝗲𝘀, 𝗺𝗮𝘁𝗲𝗹𝗼𝘁𝘀 ? 𝗩𝗼𝘂𝘀 𝗽𝗼𝘂𝘃𝗲𝘇 𝗳𝗮𝗶𝗿𝗲 𝘂𝗻 𝗱𝗼𝗻 𝗲𝘁 𝗮𝗶𝗻𝘀𝗶 𝗻𝗼𝘂𝘀 𝘀𝗼𝘂𝘁𝗲𝗻𝗶𝗿 !

💬Commentaires

1.Posté par Koyolite TSEILA le 27/02/2024 14:24 | Alerter
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KoyoliteTseila
Une belle fiche de lecture, dotée d'une anecdote personnelle de vie touchante et très intéressante. En effet, il y a parfois des personnes et des noms qui changent notre vie 🙏

2.Posté par Jean Christophe GAPDY le 10/04/2024 11:51 | Alerter
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JCGapdy
Une très agréable, mais très étonnante lecture qui happe et fait passer par d’intenses réflexions et émotions. On arriverait à croire que l’auteur a vécu ces événements aussi bien que les sentiments qu’il retranscrit, qu’il a parcouru ce monde d’un assez récent autrefois jusqu'à celui de presque maintenant. En tout cas, il a su, non seulement parler d’humanité avec ce petit clan voyageur qui a traversé, au son du violon, une partie de l’Europe, mais il a fait vibrer, au travers de ses mots et de ses phrases, une peinture très riche de ces décennies, allant de la presque insouciante au début du roman, pour plonger dans les drames de la guerre, avant de nous faire revenir à la vie et au-delà.
Grand amateur de nombreuses formes de littérature, j’ai été comblé de la première à la dernière page de cette lecture emplie d'autant de poésie que de réalisme.

3.Posté par Michel MAILLOT le 22/04/2024 12:53 | Alerter
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mmaillot
Les livres nous causent, ils causent de nous, nous causent du bien, rarement du mal, même lorsqu’ils le décrivent de manière crue. Celui-là nous touche, en pleine tête, en plein cœur. Il nous fait remonter des souvenirs. Pêle-mêle, les Tziganes, les Gitans, les Romanichels, nos Indiens à nous. Comme ces lointains cousins humains, rejetés, mal-aimés, toujours soupçonnés du pire parce que différents. Je me souviens donc de cette roulotte, stationnant à côté de l’endroit clos où nous étions en pension mon frère et moi à Saint-Hilarion, début des années 60. Un lieu tranquille où nous partagions la cour avec la petite école primaire. On nous avait bien dit, attention, ne pas s’approcher de ces gens-là, des voleurs de poules, d’enfants et de bien d’autres choses encore. En plus, ils étaient forcément sales, à vivre ainsi dans cette carriole tirée, oui, par un cheval à l’époque. Des paroles pour nous faire peur ? Sans doute. Mais pas dénué de cette forme d’intolérance qui perdure pour l’étranger. Viendront ensuite des images pour adoucir, puis faire rêver. Un Spirou et Fantasio « Il y a un sorcier à Champignac » avec la tendresse de Franquin. Les Clubs des Cinq avec Jo, sosie de Claude, le garçon manqué, et toute sa famille de forains. On en croisera des vrais, venant à l’école Victor Hugo à Sevran en 1965-66. Juste quelques jours, le temps de suivre le périple avec leurs parents. Images de garçons, souvent muets, pas très propres qui s’essuyaient le « zizi » avec leurs mouchoirs. Drôles de souvenirs qui marquent l’esprit.

Et puis plus tard, sur la barbarie nazie, la projection de « Nuits et Brouillard » d’Alain Resnais au collège Crétier à Sevran en 5ème. L’empreinte indélébile de ces corps emmêlés, poussés par des engins dans une fosse, des scènes qui se gravent dans la mémoire de celui qui sort, déboussolé, de la petite bâtisse et reviennent encore aujourd’hui pour vous hanter. Parce que l’innommable ça n’a pas de nom, mais souvent des images.

Tout remonte à la surface, à la lecture de ce terrible et à la fois magnifique roman qui mêle en deux temps, le plongeon vers le mal absolu, les ténèbres, avant le douloureux retour à la lumière et la vie. En plusieurs moments qui se chevauchent. D’abord ce coup de poing au plexus qui vous envoie à terre puis un long et lent cheminement vers l’espérance.

La main implacable du destin qui écrase les êtres, l’accablement, la chape de l’obscur qui s’abat et révèle la noirceur des hommes. Une noirceur qui s’instille, qui g...

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