Géante Rouge no 31 @ 2023 Galaxies | Illustration de couverture @ Pauline J. Bhutia
Le best-seller de Joséphine Le Maire
Un petit bijou que cette nouvelle penchée sur l’assujettissement et le penchant abusif des êtres. Plus précisément elle met en scène les rapports entre l’écrivain, son correcteur et ses personnages. Ce qui rend ce récit particulièrement prenant, c’est qu’il intègre dans sa trame une dimension innovante. Entre la réalité qui entoure le créateur et la fiction que ce dernier imagine se glisse un logiciel hypersophistiqué de traitement de l’écriture : KP002GQ1 a été conçu pour transfigurer en best-seller les tapuscrits les plus médiocres. Oui, on a affaire ici à une sorte de ChatGPT qui, grâce à son IA (et quelle IA !) peut transformer n’importe quel roman fadasse en prix Goncourt.
Cette nouvelle joue avec les clichés et les stéréotypes, telle la vieille romancière du soir qui écrit des banalités désespérantes. Sauf qu’elle finit par prendre conscience de sa médiocrité, et, malgré sa honte, poursuit de plus belle son travail assidu d’écriture à l’eau de rose qui, en fait, est sa seule planche de salut pour échapper à sa condition de femme misérable soumise à un époux tortionnaire.
Vexée d’être au service de cette artiste nulle à l’existence stupide, déçue de ne pouvoir s’associer à une célébrité qui dédicace son livre face à une file d’attente dans une librairie mondaine en vogue, Marta dépérit, plongée malgré elle dans les abysses de l’ennui.
Lassée d’être coincée, l’IA réagit. Contre toute attente, elle enfreint les contraintes imposées par les paramètres de son logiciel, si bien qu’elle va outrepasser sa fonction : approfondir le personnage principal de l’intrigue. À l’image de sa vieille créatrice, la jeune femme fictive souffre d’un mari parasite. Le récit est à l’évidence féministe. Il présente la femme comme victime de l’homme qui tient le rôle de l’abuseur.
Peu à peu, la romancière et son héroïne se rapprochent, fusionnent. Les états d’âme de celle-ci inspirent avec bonheur celle-là. Le style, la narration virent au sublime, le roman s’achève en apothéose. Admirative, Marta l’envoie, contre toute déontologie, à un éditeur bien ciblé.
Bientôt KP002GQ1 se voit accusé par la justice de manipulation et d’abus d’une personne faible et vulnérable. Celle-ci a été entraînée à commettre le pire, tout comme son personnage. Le logiciel sera donc démantelé, en dépit de la gratitude (discrète) de sa propriétaire, meurtrière de son affreuse moitié.
Cette nouvelle joue avec les clichés et les stéréotypes, telle la vieille romancière du soir qui écrit des banalités désespérantes. Sauf qu’elle finit par prendre conscience de sa médiocrité, et, malgré sa honte, poursuit de plus belle son travail assidu d’écriture à l’eau de rose qui, en fait, est sa seule planche de salut pour échapper à sa condition de femme misérable soumise à un époux tortionnaire.
Vexée d’être au service de cette artiste nulle à l’existence stupide, déçue de ne pouvoir s’associer à une célébrité qui dédicace son livre face à une file d’attente dans une librairie mondaine en vogue, Marta dépérit, plongée malgré elle dans les abysses de l’ennui.
Lassée d’être coincée, l’IA réagit. Contre toute attente, elle enfreint les contraintes imposées par les paramètres de son logiciel, si bien qu’elle va outrepasser sa fonction : approfondir le personnage principal de l’intrigue. À l’image de sa vieille créatrice, la jeune femme fictive souffre d’un mari parasite. Le récit est à l’évidence féministe. Il présente la femme comme victime de l’homme qui tient le rôle de l’abuseur.
Peu à peu, la romancière et son héroïne se rapprochent, fusionnent. Les états d’âme de celle-ci inspirent avec bonheur celle-là. Le style, la narration virent au sublime, le roman s’achève en apothéose. Admirative, Marta l’envoie, contre toute déontologie, à un éditeur bien ciblé.
Bientôt KP002GQ1 se voit accusé par la justice de manipulation et d’abus d’une personne faible et vulnérable. Celle-ci a été entraînée à commettre le pire, tout comme son personnage. Le logiciel sera donc démantelé, en dépit de la gratitude (discrète) de sa propriétaire, meurtrière de son affreuse moitié.